Physique attoseconde sur miroirs plasma relativistes
En focalisant le laser « Salle Noire » avec une parabole hors-axe d’ouverture f/1.5 à la surface d’une cible solide (habituellement du verre poli), le plasma ainsi créé est très dense et empêche le laser de s’y propager, sans pour autant l’absorber : il réfléchit donc la lumière laser. On appelle cela un miroir plasma, dont les électrons se font secouer par les oscillations du champ laser de sorte que la surface du miroir oscille à une vitesse proche de celle de la lumière. Grâce aux principes de la relativité, les cycles d’oscillation de la lumière réfléchie sont comprimés dans le temps, donnant ainsi naissance à des flashs lumineux encore plus courts que le laser lui-même, cette fois-ci dans le domaine attoseconde et contenant des composantes ultraviolet (UV) et ultraviolet extrême (XUV). En même temps, lors de la réflexion sur le miroir plasma, le laser accélère également des paquets d’électrons relativistes de durée femtoseconde ainsi que des paquets d’ions.
Bien souvent, la cible est pré-ionisée avec une impulsion d’énergie bien plus faible, qui arrive quelques picosecondes avant l’impulsion principale ultra-intense. Cela permet ainsi de contrôler à l’échelle nanométrique le gradient de densité du plasma de surface, qui est un paramètre crucial pour l’interaction laser-plasma.
Pour une impulsion dont la durée est de l’ordre du cycle optique, la phase enveloppe-porteuse change considérablement la dynamique du plasma. Le laser conçu en Salle Noire a la capacité de piloter cette phase et d’observer les différents phénomènes qui en dépendent. Expérimentalement, on peut par exemple observer l’émission d’un spectre XUV continu (phase nulle) ou d’un spectre cannelé (phase opposée), correspondant respectivement à l’émission d’une impulsion attoseconde unique ou d’une paire d’impulsions attosecondes.
L’interprétation de nos résultats expérimentaux est soutenue par des simulations effectuées par des collègues. Par exemple, cette simulation de la réflexion d’une impulsion laser relativiste de 3.5 fs (1.5 cycles optiques) faite par Maxence Thévenet du Lawrence Berkeley National Laboratory montre bien la compression de l’impulsion réfléchie, représentée par le module de son champ magnétique :
Plus de détails sont visible dans cette vidéo montrant une vue zoomée sur l’interaction entre un miroir plasma et une impulsion laser de 25 fs (une dizaine de cycles optiques), avec seulement le champ magnétique des nouvelles composantes XUV représenté, ainsi que la densité électronique par une échelle de gris :
Publications associées :
- « Lightwave-controlled relativistic plasma mirrors », Marie Ouillé et al., Opt. Lett. 49, 4847 (2024)
- « High repetition rate relativistic laser–solid–plasma interaction platform featuring simultaneous particle and radiation detection », Jaismeen Kaur et al., Rev. Sci. Instr. 94, 113002 (2023).
- « High-Harmonic Generation and Correlated Electron Emission from Relativistic Plasma Mirrors at 1 kHz Repetition Rate », S. Haessler et al., Ultrafast Science 2022, 9893418 (2022)
- « Generation of XUV spectral continua from relativistic plasma mirrors driven in the near-single-cycle limit», Frederik Böhle et al., Phys. Photonics 2 034010 (2020)
- « Few-cycle laser wakefield acceleration on solid targets with controlled plasma scale length», Neil Zaïm et al., Physics of Plasmas 26, 033112 (2019)
- « Anticorrelated emission of high harmonics and fast electron beams from plasma mirrors», Maïmouna Bocoum et al., Physical Review Letters 116, 185001 (2016)
- « High repetition rate plasma mirror device for attosecond science», Antonin Borot et al., Rev. Sci. Instr. 85, 013104 (2014)
- « Attosecond lighthouses from plasma mirrors», Jonathan A Wheeler et al., Nature Photonics 6, 829-833 (2012)
- « Attosecond control of collective electron motion in plasmas», Antonin Borot et al., Nature Physics 8, 416-421 (2012)